2009/06/11

Vert soyeux et noir scintillant

La vitrine de la boutique antiquaire raconte une histoire de soie verte, des meubles résistés aux époques, des chats photographiés autrefois en noir et blanc. Et du coup, à mon passage près de la vitrine, j’aperçois un vrai chat noir, allongé sous l’un des fauteuils imposants. Oui, le chat est vrai, vivant et respirant. Il demeure au sol et se croit à l’abri des regards curieux des visiteurs. Ce devrait être le chat du propriétaire de la boutique. Son pelage du noir scintillant fait paraître le velours vert de la tapisserie et la soie verdoyante des rideaux encore plus intenses. Ce chat a – t – il reconnu les chats des vieux portraits accrochés à quelques pas de lui? Et ce décor, même vu de l’extérieur, n’évoque- t – il pas le décor d’une pièce théâtrale: plus précisément, le moment après le spectacle; le moment quand les acteurs sont déjà partis, mais l’esprit de l’histoire déjouée remplit encore l’espace alentour ? Contemplant ainsi les détails présents, on se demande qui ont été les varis maîtres de cette scène de maison ; qui s’est reposé dans le creux du velours vert, qui a aimé ces chats, nous fixant des images. Et finalement, qu’est – ce qui a incité le vrai chat noir à se poser là, à chercher un abri près des meubles vides, décorant la vitrine antiquaire ? Ou bien, cette exquise ne serait qu’une histoire de plus, garnie abandonnement du vert soyeux, percée du noir scintillant…Tout cela pour prouver que la vie se poursuit malgré l’ancienneté. Il y aura toujours un chat vivant qui saura voir là où les humains ne peuvent pas...

2009/06/08

Le chant matinal des oiseaux

Demeurer bercé par le chant des oiseaux. Leurs voix sont cristallines tôt, à l’arrivée de l’aube et des premiers rayons. On se lève doucement, on soulève le rideau, on s’efforce de les trouver du regard. On cherche ces oiseaux dans le vert éclatant des arbres en face, mais on ne peut pas saisir leurs silhouettes fines. Les oiseaux sont presque invisibles ou le sommeil fait encore lourdes nos paupières. On regarde l’horloge et on se dit qu’on va profiter de la gracieuseté du temps et retourner quelques instants dans la douceur du lit. Dès qu’on se recouche et dès qu’on s’écarte des pensées quotidiennes, on réentend le chant matinal des oiseaux. On reste ainsi : allongé, couvert, calme et plongé dans leurs mélodies. Les oiseaux sont dans les arbres et encore invisibles, mais leurs voix sont saisissant et cela suffit de s’endormir pour regagner la lumière un peu après.

Arroser les plantes le matin

Un matin, on se réveille, on ouvre la porte de la terrasse parce qu’on sait qu’il faut arroser les plantes. Les petits grains, qu’on a semés depuis quelques semaines et qu’on arrose consciencieusement depuis un certain temps, ont poussé. On s’aperçoit des brins verts qu’hier n’ont pas été là. On se dit que c’est ça la vie : un brin qui jaillit de la terre à son heure. Et c’est à ce brin – là de choisir sa vie, à toi ne reste que la contemplation de sa tige gracile, frêle mais élancée.

2009/06/03

Ce qui est grand et ce qui est petit ou encore un peu sur Philadelphia

Sans savoir grand-chose sur Philadelphia, je me suis rendue dans cette ville des Etats – Unis chez des amis. Dès ma première demi – heure de promenade sur ses larges rues et après le dévisagent des panneaux indiquant la location des musées, des bibliothèques et des écoles, dès ma première rencontre avec son architecture riche, où la majesté de l’ancien et la permanence du moderne se frôlent, j’ai eu l’étrange impression que cet endroit me rappelle une ville déjà connue. La légère poussière soulevée par nos pieds, le ciel limpide et le soleil intense mais clément, les gouttelettes répandues par les jets des fontaines éblouissantes, la jouissance et le brouhaha citadins, les passant de toutes races et l’écho des plusieurs langues, les grandes affiches annonçant des expositions du renommé mondiale, tout cela évoquait en moi un goût d’étrange familiarité, même si la ville était nouvelle pour moi. Du coup, mes amis ont approché un banc pour s'asseoir là et mettre encore du crème solaire à leur enfant. Près du banc, mon regard a tombé sur une brochure décrivant les sculptures de Rodin. C’est alors que je me suis exclamée que Philadelphia me rappelait Paris. Mes amis, tout en cherchant la crème solaire et l’eau dans la poussette de leur fils, m’ont rétorqué que cela ne pouvait pas être possible ; que Paris c’était Paris, l’unique au monde, et même s’ils ne l’avait jamais visitée, même s’ils aimaient leur Philadelphia, ils n’étaient pas d’accord avec mon comparaison, « tellement incongrue ». Pourtant, à quelques pas de notre banc, ils me montraient la sculpture du Penseur, se dressant silencieusement dans l’ombre des arbres près de l’entrée du musée Rodin à Philadelphia. Oui, il y a un musée Rodin à Philadelphia (rodinmuseum.org). Un grand collectionneur américain avait offert les sculptures acquises et les premières copies des originaux à la ville pour construire ce temple de l’art. Le musée Rodin, tout près de notre banc, m’a confirmé la ressemblance avec Paris. Cette ressemblance n’est pas trop explicite, mais je la saisissait dans l’esprit des rues centrales et de leur ambiance. Un peu plus loin, dans le musée des beaux – arts de Philadelphia, une exposition de Cézanne invitait les gens à franchir ses portes. Là, j’ai su que la plus grande collection au monde des tableaux post -impressionnistes résidait à la maison du docteur Barnes, toujours à Philadelphia et non pas au Quai d’Orsay comme je le croyais auparavant (www.barnesfoundation.org). Oui, dr. Barnes était devenu richissime en inventant un vaccin et des médicaments importants. Avec son argent, il avait collectionné plusieurs Renoir, Cézanne, Matisse, Monet, Modiliagni, El Greco, Goya, Van Gogh et Picasso. Il avait installé les tableaux sur les murs de sa maison non pas par ordre chronologique des tableaux et des styles, mais par la symbolisation que lui – même avait trouvée dans les images. Il a voulu que sa maison soit devenue une école des beaux arts. Le débat présent, à Philadelphia, était si d’autres musées et fondations avaient le droit d’acquérir la collection de dr. Barnes pour en familiariser ainsi de nombreux visiteurs ou la richesse de cet art inestimable devrait demeurer en privé dans la maison du défunt docteur. Voilà, des débats sur l’art, il y en avait aussi à Philadelphia.
En poursuivant notre trajet sur les rues de cette ville, j’ai expliqué à mes amis que si à Paris, ils pouvaient marcher dès le Louvre jusqu’à l’Arche du Triomphe en passant par la Place de la Concorde et en suivant un peu plus loin l’avenue des Champs- Elysés, à Philadelphia, nous marchions aussi « en ligne droite » dès la place de la grande fontaine, traversant l’avenue décorées des drapeaux des nations et nous arrivions ainsi au pied des grands monuments et du leur museum of fine arts (philamuseum.org). Là, la statue de Rocky (prototype d’un Sylvester Stallone, vainqueur et élancé) enthousiasmait la foule.
Finalement, les sémaphores en face des cathédrales, les panneaux « One way », les pauvres faisant la queue à côté de la Basilique Saints Peter and Paul (www.sspeterandpaulcathedral.catholicweb.com) pour recevoir une soupe ce dimanche, les riches débarquant avec leurs sacs Louis Vuitton devant le Hilton local, les drapeaux de tous les pays déployés tout au long des allées de la rue centrale, l’enfant souriant de mes amis, l’installation de la Pince géante devant un gratte – ciel, les gens ne résistant pas à la tentation et plongeant dans l’eau cristalline des fontaines, les quatre lettre géantes elles aussi de
« LO
VE »
au cœur de Philadelphie, cette ville de quelques 300 ans, tout cela reformule la question sur ce qui est grand et sur ce qui est petit…

L'esprit urbain de Philadelphia - grand, petit, ancien et moderne












Formes conçues par l’humain





L'inatteignable

Nous, les humains, sommes petits aux pied des gratte- ciel. Et pourtant, nous sommes ceux qui les ont conçus et construits. Non, les gratte – ciel ne sont pas les nouveaux tours de Babel. Les humains contemporains ne se préoccupent pas tellement du divin ; il leur paraît toujours loin. Nous sommes concentrés souvent en nous – mêmes, en nos for intérieurs, en nos problèmes à résoudre. Nous avons besoin de cette grandeur et de ses lignes pour nous convaincre que notre existence est bien remplie ; que grâce à tout cet alentour édifié, l’échappatoire du néant est plus facile. Avec les gratte-ciel, nous tentons de nous persuader que notre monde existe et que nous y existons avec. Au pied des gratte-ciel de Philadelphia, je n’ai pas eu l’impression que les gens dans cette ville ont voulu défier le ciel, mais qu’ils ont voulu juste remplir leur univers en l’édifiant. Ils ont ainsi légué le message aux générations que quoi qu’il arrive sur cette terre – là, l’humain témoigne pour l’humain en construisant. C’est souvent son unique réconfort. En plongeant dans les lignes des gratte- ciel, je n’ai pas eu peur ; je n’ai senti aucune menace, aucune énormité écrasante, aucun cri désespéré contre le vide. Au pied des gratte – ciel de Philadelphia, j’ai été consciente que les humains ont besoin de se confirmer la présence de l’existence… Tout en sachant que le bout du ciel, derrière l’immensité de leurs bâtiments, sera toujours là. Inatteignable.

Les gratte-ciel de Philadelphia